Le château des Tribades.
Auteur de roman à l’eau de rose, Inès est en panne d’inspiration, suite à un traumatisme provoqué par une tentative de viol. Depuis, elle s’est isolée dans un chalet de montagne, coupée du monde, indifférente aux injonctions de son banquier et de son éditrice qui s’impatientent.
Rêveuse, effacée, elle prend rarement part à l’effervescence de son milieu, se contentant de sa solitude, se déconnectant de la réalité en voulant toujours croire au grand amour et au prince charmant, avec ce même romantisme que les héroïnes de ses romans.
Au cours d’un cocktail littéraire, l’occasion s’offre à Inès de pouvoir renouer avec le succès. On lui propose en effet de rédiger la biographie du richissime et mystérieux producteur Jean Vernier. Pour Inès, c’est une opportunité sans précédent. Elle accepte l’invitation de Jean Vernier, séducteur cynique et égocentrique qui, pour l’occasion, lui ouvre les portes de son château cathare, dans les Pyrénées Orientales. A la grande surprise d’Inès, d’autres invitées s’y trouvent déjà. Elle est la sixième personne d’un groupe pittoresque et inquiétant, exclusivement féminin, toutes de milieux différents, qui ne se connaissent pas mais qui ont un même et seul objectif : obtenir gloire et fortune grâce à l’influence de leur hôte, et prêtes à tout pour y parvenir. Elle devra côtoyer des personnages aussi torturés que pervers, aux sombres desseins, et sa troublante beauté fera des ravages, déchaînant les pulsions les plus sauvages.
Sans se douter un instant qu'elle est au centre de manigances dépravées, où toutes ces femmes ont de bonnes raisons pour la convertir et la pervertir, avec la promesse d'un contrat exclusif avec Jean Vernier pour celle qui sera la première à l'entraîner dans son lit. Une course à la gloire où elles vont toutes se disputer les faveurs d'Inès, rivalisant d'imagination et de perversité, bousculant ses valeurs hétérosexuelles pour la perdre dans des étreintes lesbiennes.
Inés, seule et désemparée, réussira t-elle à déjouer leur complot et préserver son innocence ?
Sur son piédestal rocheux, le château dominant la haute vallée semble étendre son ombre. Lugubre et imposant.
Debout prés de la fenêtre de sa chambre située dans l’aile nord du château, Gabrielle brosse ses longs cheveux blonds avec lenteur, d’un air pensif. Elle contemple en même temps le paysage sec et aride, sans relief, avec des vignes qui s’étendent à perte de vue, bordées ici et là par de petits murets de pierre délimitant les exploitations. Soudain, son regard se fige lorsque la sensation revient. Cela recommence… L’impression d’une autre présence, d’être épiée, surveillée… Une influence très forte et irréelle. Comme si des yeux intenses traversaient les murs et se fixaient sur elle. Elle frissonne, serre instinctivement les pans de son peignoir sous lequel elle est entièrement nue. Tout à l’heure, sous la douche, elle a ressenti cette même sensation étrange, et une douce chaleur lui a noué le ventre, un frisson voluptueux qui lui a donné la chair de poule. Ce qu’il y’ a de plus incroyable dans cette impression de ne pas être seule, c’est qu’elle ne ressent aucune peur, aucune crainte, mais un trouble indéfinissable. Comme si l’air était chargé d’électricité, une atmosphère sensuelle qui vous prend et vous enveloppe dans un voile de mystère et d’érotisme latent. Evidemment, elle ne croit pas aux fantômes ou autres événements surnaturels, mais il faut dire que le décor s’y prête : un domaine viticole immense et isolé, un château cathare perdu au milieu des vignes, une impression de luxe et d’opulence qui transpire dans la décoration intérieure, à la fois gothique, feutrée et intime. Et il n’y a pas que cela. Ici, le personnel est exclusivement féminin, et comme trié sur le volet : toutes sont jeunes, jolies, et terriblement sexy. Ce qui n’est pas pour lui déplaire… Tout cela complète une atmosphère de sensualité, de liberté et d’audace. Elle en est là de ces pensées étrangement agréables lorsque quelqu’un frappe à la porte.
- Entrez.
Elle se retourne en même temps, suivant des yeux la servante qui entre avec un plateau qu’elle dépose aussitôt sur une table basse en chêne massif, prés du lit. La servante se redresse et l’observe à son tour.
- C’est bien ce que vous aviez demandé, Madame. Un verre de jus d’orange, café, croissant sans beurre et fruits secs…
A vrai dire, Gabrielle n’a pas jeté un regard sur le plateau, bien trop occupée à déshabiller la jolie domestique du regard. Elle s’appelle Florence, une adorable blonde aux cheveux coupés courts, aux yeux noisette qui arbore toujours un sourire chaleureux et coquin, presque ironique, comme si la vie lui réservait toujours des surprises. Elle est belle, une beauté fraîche et piquante, avec un doux visage ovale qui rayonne de gaieté, et un corps splendide, tout en courbes harmonieuses, fines et graciles, des formes d’adolescente presque… Gabrielle sent ses seins se durcir et tendre le tissu du peignoir. C’est d’une voix rauque qu’elle répond :
- Très bien, c’est parfait.
Elle s’approche d’elle, en prenant l’air le plus naturel du monde. Florence la laisse venir à elle sans réagir, un petit sourire amusé sur les lèvres. Tout de fois, lorsque la femme tend le bras pour lui toucher la joue, elle a un petit mouvement de recul.
- N’aie pas peur, je veux juste t’arranger les cheveux.
En effet, Gabrielle lui remet en arrière des mèches rebelles qui ne cessent de retomber sur son joli front. Florence continue de se laisser faire lorsque, maintenant, la femme continue de passer les mains dans ses cheveux, comme cherchant à la recoiffer, ce genre de petit geste innocent et affectueux qu’une femme peut avoir pour une autre femme. Mais, ensuite, la caresse à fleur de peau sur sa nuque semble bien moins innocente. Du bout des doigts, elle contourne son cou et effleure sa gorge, son menton, puis le visage, et enfin sa bouche où la caresse se fait plus précise.
- Comme tu es belle… s’extasie Gabrielle.
Le genre de phrase qu’une femme adore entendre. Et cette douceur, cette sensualité… Tout cela l’envoûte, l’électrise. Elle entrouvre ses lèvres lorsque Gabrielle y introduit un doigt, allant et venant dans sa bouche avec une obscénité mêlée de volupté. D’instinct, elle bouge la langue et suce le doigt avec une gourmandise qu’elle ne s’était jamais connue. Gabrielle gémit, tremble lorsque Florence sursaute à son tour.
Le désir qu’elle perçoit dans les fascinants yeux gris lui donne le vertige. Florence voit s’entrouvrir ses belles lèvres pulpeuses et respire ce mélange d’odeurs qui monte de cette splendide femme , gel douche, shampooing et parfum épicé qui la grisent davantage. Elle ferme les yeux lorsque la bouche humide se presse contre la sienne, et se sent mollir lorsque la langue se joint au doigt pour parcourir l’intérieur de sa bouche avec une agilité déconcertante. Jamais aucune femme ne lui avait produit un tel effet si vite… Florence se demande avec extase si la suite va se révéler aussi éblouissante, mais ce qui se passe ensuite ne lui donne aucune envie de réfléchir. Gabrielle vient de la jeter sur le lit, se collant aussitôt à elle. Elle reprend possession de sa bouche, ne lui laissant aucun répit, comme par peur qu’elle retrouve ses esprits. Justement, Florence retrouve un instant sa lucidité. Elle vient de se rappeler les ordres. Aucun contact physique, aucun attouchement. Rien. Là, c’est mal parti… Elle risque sa place pour ne pas avoir respecté les directives du patron. Elle doit provoquer, allumer, mais c’est tout. Merde, elle n’est pas un robot tout de même ! Elle a aussi des pulsions, des envies, comme tout le monde. A force de jouer avec le feu, on s’y brûle… Et puis, avec une autre, elle aurait pu résister, mais pas avec cette femme qui est le diable incarné, la tentation dans toute sa splendeur. De toute façon, c’est trop tard. Avec une surprenante dextérité, Gabrielle l’a déshabillée en un tour de main, et c’est nue elle aussi qu’elle se frotte maintenant contre elle en ahanant. Florence lui renvoie ses bonds, noue ses jambes autour des fesses féminines, la pressant davantage contre elle pour que leur sexe soit en contact étroit. Déjà, son vagin est trempé, lubrifié comme jamais il ne l’a été, alors que Gabrielle ne l’a pas encore caressé. C’est fou, elle n’en peut plus, cette femme a le don d’enflammer ses sens et d’éveiller des pulsions sauvages avec un art inné qu’elle n’a jamais rencontré chez aucune autre personne.
Pourtant, elle en a eu des aventures, avec des hommes et des femmes, des expériences souvent heureuses et plaisantes qu’elle n’a de cesse de vouloir renouveler. Evidemment, les plus enrichissantes sont celles qu’elle a eu avec des femmes, c’est incomparable, et justement elle pensait ne plus pouvoir être surprise. Ou si peu. Erreur grossière alors que leurs mains se touchent et se croisent, partant à découverte de leur corps impatients. Leur excitation mutuelle les fait râler et trembler, leurs bouches continuent de haleter l’une contre l’autre alors que les langues se nouent et se dénouent avec une fièvre croissante. Gabrielle est la première à glisser sa main entre les cuisses de son amante. Florence les écarte, son extase monte alors que deux doigts la pénètrent facilement, glissant et s’enfonçant dans son vagin tandis que le pouce s’insinue dans sa vallée intime, glissant tout le long, accentuant son excitation avant de masser son clitoris qui devient dur comme un bouton de rose. C’en est trop. L’orgasme est si rapide et violent qu’elle crie de surprise et de bonheur. Elle se casse en deux, jouit aussitôt une deuxième fois avec une intensité plus forte que la première, tout simplement parce que Gabrielle a introduit en elle un troisième doigt qui a décuplé ses sensations. Eblouie, elle se laisse retomber sur le lit avec un soupir d’aise. Gabrielle la bascule sur elle, s’étend bras et jambes écartée avec une fébrilité impudique. Ses attentes sont légitimes. Elle a donné du plaisir. Maintenant elle veut en recevoir. Ses yeux fous, ses cheveux en bataille, son magnifique corps luisant de transpiration, tout indique une excitation incontrôlable qui quémande un apaisement urgent.
Florence, tout en ayant envie de satisfaire ses désirs, hésite un instant. Jusque là, elle a transgressé les ordres mais pourrait éviter l’irréparable en arrêtant tout maintenant. Il n’est pas trop tard pour réparer ses erreurs. Son regard s’attarde sur le long corps élancé de Gabrielle, ses mouvements sinueux, la houle qui l’agite, son ventre qui monte et descend, sa main qui glisse entre les jambes, frôlant le sexe mouillé et ouvert. Non, ce serait inhumain de la laisser dans un tel état. Tant pis pour les ordres. Après tout, personne n’en saurait rien, la salle de contrôle et télésurveillance étant interdite puisque le patron était absent. C’est avec autant d’impatience qu’elle se penche donc vers son amie, s’agenouillant entre ses cuisses. Elle lui dévore les seins, des seins qu’elle pourrait lécher des heures tant ils sont beaux, gros et fermes. Elle ne s’en lasse pas, les picorant avidement, tandis que sa main droite glisse sur le ventre et s’insinue entre les cuisses. D’abord, elle pose sa main à plat sur le triangle secret, jouant avec les poils pubiens. Geignant de frustration, les bras posés sur son dos, Gabrielle est incapable de contenir les spasmes qui partent de son bas-ventre pour l’ébranler impitoyablement, au bord de l’orgasme mais ne pouvant se libérer car la caresse n’est pas assez précise. En proie au délire, elle se frotte violemment contre les doigts sur lesquels elle a tant envie de se laisser fondre. Florence a pitié d’elle, et satisfait à sa demande. Ses doigts parcourent enfin la fente humide, brûlante comme de la braise, avant de se laisser aspirer par ses intimes moiteurs. Gabrielle pousse des petits cris extasiés, agitant convulsivement les reins et écartant davantage les cuisses avec une souplesse étonnante, pour mieux s’ouvrir au va-et-vient de la main active. Le ventre en feu, elle s’offre toute entière en se tordant comme une limace prise de folie, alors qu’elle sent un orgasme incroyable monter en elle, grossir et s’amplifier avec une densité extraordinaire. Elle se sent prête à être anéantie par une jouissance jamais atteinte lorsque des coups violents sont frappés à la porte.
- Florence, viens tout de suite ! ordonne une voix féminine.
Florence se fige. Gabrielle serre les cuisses sur sa main, la retenant et la suppliant de continuer.
- Je t’en prie, chérie, n’arrête pas…
Les coups sur la porte se font insistants. Derrière, la voix féminine claque sèchement
- Florence, je sais que tu es là… J’entre dans deux secondes.
A l’annonce de cette menace, les deux femmes se lèvent vivement. Complément dégrisées, elles se rhabillent avec hâte, Gabrielle enfilant vite son peignoir avant de décider, tout compte fait, de filer dans la salle de bain. Elle s’y réfugie en claquant la porte derrière elle. Brusquement, Florence se retrouve seule dans la chambre, à moitié vêtue, lorsque la porte d’entrée s’ouvre d’un coup, laissant surgir une petite blonde furieuse qui analyse la situation d’un seul coup d’œil.
- Je le savais… T’es une vraie petite garce en chaleur ! siffle t- elle.
Florence lui intime le silence en désignant la salle de bain de la tête. La petite blonde comprend et sort tout de suite, suivie de prés par Florence qui finit de se rajuster. La porte est à peine fermée qu’elle se fait sévèrement réprimander.
- Merde, Flo, tu connais les ordres pourtant ! Tu ne devais en aucun cas coucher avec elle… Juste l’allumer et la chauffer un maximum, c’est tout…
Florence a retrouvé sa dignité et, surtout, son aplomb. Elle sourit avec bravade.
- Pour la chauffer, crois-moi que j’ai obéi aux ordres. Elle est chaude-brûlante la bourgeoise, un rien et elle se liquéfie sur place.
- Comment ça ?
- Je l’ai laissée sur sa faim alors qu’elle était au bord de l’orgasme. Je ne pouvais pas mieux faire pour l’exciter un maximum.
- Ouais… Parce que je suis intervenue à temps, sinon vous alliez jusqu’au bout.
- T’inquiète, je gérais très bien la situation… Dis, tu ne diras rien au patron ?
Sur ce, elle colle la blonde contre le mur et l’enlace tendrement. Celle-ci veut protester mais Florence la fait taire d’un baiser fougueux. La blonde gémit et l’embrasse à son tour, incapable de résister aux tendres sollicitations de la langue qui la provoque délicieusement. Essoufflée, elle penche la tête en arrière et constate faiblement :
- Tu es un monstre… un monstre que j’adore.
- Dis, t’es pas jalouse au moins… C’était juste pour le boulot.
- Non, je ne suis pas jalouse. Et toi et moi on ne s’est rien promis. Tu es libre de coucher avec qui tu veux, tu le sais très bien.
La gravité de son expression, ses yeux humides et voix tremblante démentent le contraire. Mais elle ne l’avouera jamais. Tomber amoureuse d’une femme comme Florence est un avenir qui sera toujours basé sur des trahisons et des mensonges. Douleurs, larmes et déchirements, voilà bien ce qu’elle tient à éviter pour tout l’or du monde. Florence vit dans un univers d’insouciance et de liberté, et elle avait été choisie pour toutes ces qualités. Comme elle d’ailleurs, mais elle avait toujours été un brin sentimentale, une faiblesse qu’elle ne pouvait pas se permettre ici, dans ce château, où il s’en passait de drôles de choses… Aussi, elle s’arme de détermination en se persuadant que leur relation est juste une histoire de cul. C’est tout. Décidée à ne plus se laisser manipuler, elle la repousse et s’éloigne d’un pas vif. Florence la talonne. Elle est enjouée et curieuse.
- Fanny, attends-moi. Dis, pourquoi il faut se contenter de jouer avec les nerfs de cette femme ?
Sans se retourner, descendant rapidement les larges escaliers qui mènent au salon, Fanny lui répond malgré tout.
- Parce que le patron veut qu’elle soit en condition de surexcitation totale lorsque les invitées vont arriver. Gabrielle est une redoutable croqueuse de femmes, et notre boulot consiste justement à ce qu’elle ne puisse rien se mettre sous la dent jusqu’ici…
- Mais pourquoi ?
- Il la réserve à Inès Genest.
Florence s’immobilise un instant, figée par la surprise. Elle court presque pour rattraper sa collègue.
- Inès, la romancière qui écrit des contes pour enfants.
Malgré elle, Fanny sourit.
- Non, elle écrit des bouquins à l’eau de rose pour les hétéros. Ce qui revient un peu au même…
- Mais elle n’est pas lesbienne ?
- Exact, et c’est pour ça que les ordres sont d’allumer Gabrielle sans qu’elle puisse assouvir ses envies. Le patron veut qu’elle couche avec Inès, et qu’elle soit dans un tel état qu’elle ne lui demandera certainement pas son avis pour la jeter illico dans son lit. Si vraiment tu as laissé Gabrielle aussi affamée que ça, je pense que rien ne l’arrêtera, elle va la dévorer toute crûe la romancière fleur bleue !…
Là, Florence confirme. Gabrielle est prête à tout pour apaiser ses appétits démesurés. Quelque part, elle envie la chance de cette femme écrivain. Comme elle aimerait être à sa place ! Qu’elle le veuille ou pas, Inès va affronter un déchaînement de perversité et de sensualité auxquels ses livres pour hétéros coincés sont, en effet, de vrais contes pour enfants.
A SUIVRE...